Cette histoire, j’aurais aime qu’on me la raconte, sauf que c’est a moi qu’elle est arrivee.

Cette histoire, j’aurais aime qu’on me la raconte, sauf que c’est a moi qu’elle est arrivee.

En part, la partie secrete, cachee et sans importance, car votre partie essentielle, c’est Sara qui l’a vecue.

C’etait en mars. En 1980. Ca faisait certains mois qu’on jouait a vivre en couple, Sara et moi. Cela se passait plutot bien. On faisait des asados argentins, on s’ennuyait le dimanche, j’essayais de mettre des films pour baiser mais, concernant le sexe, elle etait du matin. L’intimite, cette forme excitante en confiance, m’avait conduit a repasser ses tanguas, a lui couper les ongles et a ecouter ses ronflements, ainsi, ce personnage dont je connaissais les humeurs, les manies, la tendance a J’ai boulimie, etait de l’air entre les mains. L’intuition reste la perception immediate des choses. Mais j’ai du attendre l’annee 80 pour prendre Sara

rondeur de l’ensemble de ses fesses, sentir que je ne savais rien en commandante zero, rien de plus a part qu’on etait en mars et qu’elle avait un rendez-vous, a six heures de l’apres-midi, sur le pont en 45eme rue.

Un rendez-vous avec Alex, avec votre que les optimistes appellent une meilleure amie. Alexandra avait travaille 1 moment a l’abattoir de l’Universite Nationale. Une fois, quand j’etais a l’ecole, on m’avait emmene voir comment on sacrifiait des porcs. Pour qu’on apprenne, avait dit la prof. On etait devenus grands, on avait depece des mammiferes, on avait quitte l’ecole primaire et passe une bac. Alex etait une femme pleine de contradictions. D’etre vegetarienne, ca ne l’avait nullement empechee de travailler a l’Universite Nationale. Avec son metre cinquante, Alex avait un faible concernant nos causes perdues, concernant le risque, pour les joueurs de basket. Voila le portrait que j’ai fait d’elle a la police quand j’ai ete interroge. Ils seront arrives a onze heures. J’etais en train de regarder un film et je commencais a m’inquieter de ne pas voir Sara rentrer. Ils ont sonne, ils ont salue, puis ils ont renverse Notre commode, jete les livres par terre, se seront remplis nos poches des cartes du Kamasutra, sont entres dans la cuisine et ont bu mon pisco. Pendant l’interrogatoire, je caressais Walter, le chat qui etait arrive avec Sara. Tout d’un coup, le flic s’est foutu a me parler d’Alex, a me dire qu’elle n’avait jamais ete vegetarienne, qu’elle mesurait votre metre soixante-cinq, et que la seule chose vraie dans tout ce

que j’avais dit, c’etait qu’il s’agissait d’une salope. J’ai lance Walter sur le giron du flic et lui ai envoye un coup de poing qui possi?de fendu l’air. Peut-etre que ce coup de poing rate n’a modifie que le destin de Walter parce que le mien est deja ecrit au sein d’ un rapport!: le N 57. Ils m’ont baillonne, m’ont fera monter dans une voiture et on a traverse le quartier en pleine nuit. Le reste de l’interrogatoire, je l’ai passe dans les cachots une police militaire. —Allez, parlez-nous de ce cherie, Gonzalez. La peur m’etait passee. Pour gagner du temps, j’ai tente de leur parler d’Alex. Ne me calomnie jamais, m’avait-elle dit une fois, si l’on se disputait. En realite, je ne la connaissais pas ou, plus exactement, je la connaissais par ouie dire. Tout le monde raconte des histoires, on apprecie ca, parler des autres, raconter un secret,!n’en cause a personne, mais Alex a fera ca, c’est comme ca que nos potins commencent et apres il y a un journaliste, tel moi, qui ecrit votre reportage. Je voulais dormir a la maison, en caressant Walter, j’allais donc collaborer, bien sur, on est du meme bord. Mais, qu’est-ce qu’elle sites de rencontres avec un Г©cart d’Гўge revues m’avait fait, Alex! ? C’etait nullement la belle question, qu’est-ce qu’elle ne m’avait jamais fait, qu’est-ce qu’elle m’avait refuse, qu’est ce qu’elle ne me ferait pas!? —Gonzalez, je vous repete ma question, parlez-nous de ce copine. C’est Sara qui m’avait parle d’une torture. Je n’avais jamais ose proposer la question a Notre redaction.

Sara m’avait dit que, dans ses cachots, la police avait un endroit qu’on appelait la cour des papes.

Ou peutetre qu’on l’appelle le lit de l’inquisiteur. Si tu n’es gui?re neo-liberal, catholique et heterosexuel, on t’y enferme et t’en prends plein l’oreille. Juste ca. La phrase est de Sara, elle l’avait recopiee d’un manuel. Elle n’etait jamais capable de me raconter une histoire en entier. Elle me disait, mon amour, depuis 1 endroit, a 2 kilometres d’ici, qu’on appelle la cour des papes, puis elle se taisait, 1 nouvelle jour elle me disait limite en pleurant, j’espere qu’on ne t’emmenera pas au lit de l’inquisiteur! ; votre autre jour, mon pioupiou —je suis tres maigre—, Alex voudrait qu’on lui garde son appareil photo, il restera nullement longtemps ici, c’est votre appareil d’amateur, et fais bien attention, ne t’en sers nullement, ne l’ouvre nullement, est tranquille, ainsi, c’etait bien, mon pioupiou, aujourd’hui j’ai rendez-vous dans la 45eme rue, et on ne pouvait pas lui poser de questions parce que sinon, on faisait pression sur celle-ci, ou il lui fallait un moment a elle, ou j’etais un sale macho possessif.— Il faut reprendre les choses par le debut, M. Gonzalez. Quel genre de relation vous avez avec Sara Castro!? Pourquoi est-ce que vous viviez avec la commandante zero ? Je n’en savais rien, moi, de ces histoires de commandante, mais va faire croire que la fille qui te cajole la queue, la petite ronde avec des yeux d’agneau, a une life inconnue, anonyme et peut-etre plus authentique!? Bon, ai-je devoile au flic, je vais vous raconter 1

style tres delicat, ca devra rester entre nous. Raconter, c’est une question de ton!; j’etais dans un cachot et je demandais au flic de tendre l’oreille, j’allais bien lui raconter, comme si on avait ete au cafe, c’est ce que je lui ai devoile, imaginons que vous et moi, on soit amis et qu’on soit assis au cafe. Notre policier a foutu sa main dans sa poche, en a sorti une flasque d’eau-de-vie et a en bu une rasade. On le payait pour faire le mechant, pour debarquer chez n’importe qui a onze heures du jour et pour te sortir en calecon. —Alex, je l’ai connue en 78. Notre flic m’a envoye par terre et m’a fourni un coup de poing. —Jouez gui?re au con, Gonzalez, parlez-nous de Sara. En me relevant, j’ai senti que J’ai realite vacillait. —Justement, je lui ai repondu la main via la joue. Aujourd’hui, elle avait rendez-vous avec Alexandra. Il convient que je suspende le recit de une telle nuit-la Afin de qu’on voie une piece minuscule, un homme debout, moi, et l’autre assis, le flic, ainsi, une puissante ampoule au-dessus de ma tete. Il n’y a rien d’autre, mais l’imagination reste obsessionnelle. A ce momentla!; j’ai pense a Sara, a sa facon d’agrafer son soutiengorge, a son habitude de bouger en douche et de se promener nue dans la maison. J’ai commence a parler d’elle. Curieusement, je l’avais aussi connue en 78. C’etait Alex qui me l’avait presentee. En disant ca, J’me suis recroqueville, comme pour parer un coup,

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